Que disent les Églises chrétiennes sur l'homosexualité ?
Jusque vers 1960 toutes les Églises chrétiennes ont pris des positions négatives au sujet des actes homosexuels, les considérant comme des péchés, des actes de rejet de Dieu, un vice librement choisi. Mais pour quelles raisons ? Il y a des différences de nuances entre ces positions et ces différences ont leur origine dans les différentes manières de concevoir l’autorité à l’intérieur de chaque Église.
Les Églises protestantes
Le cas le plus simple d’autorité est la situation dans les Églises protestantes. Ici existe le principe de Sola Scriptura : seule l’Écriture a autorité. Les règles morales doivent se déduire des textes bibliques. Mais même chez les Protestants, la Bible se lit dans un cadre institutionnel qui tend à favoriser le conservatisme. Cependant, en dépit des réticences des conservateurs, dans les Églises protestantes historiques, on constate une évolution récente vers une acceptation de l’homosexualité, suite à l’adoption d’une lecture moderne, plus rationnelle, de la Bible. Ainsi l’Église Protestante Unie de France (EPUdF) permet depuis 2015 la bénédiction de couples de même sexe après un mariage civil (pourvu que la paroisse et le pasteur soient d’accord). Dans les Églises évangéliques, par contre, on favorise une attitude plus émotionnelle, avec une tendance à rejeter l’approche historico-critique de la Bible, jugée trop intellectuelle. Cela donne une lecture littérale, où les interprétations anciennes, comme celle de Philon, ne sont pas remises en cause mais semblent aller de soi. C’est pour cette raison que les Églises évangéliques sont généralement hostiles aux droits des LGBTQ+ et favorisent des pseudo-thérapies de « conversion ».
L’Église catholique
Dans l’Église catholique, la situation se complique, car à côté de l’autorité de la Bible se trouve l’autorité du Magistère (le Pape et les évêques). Les décisions morales du Magistère ne se fondent pas uniquement sur la Bible (ou les Évangiles) mais font souvent appel à des considérations philosophiques, comme dans le cas de la « loi naturelle ». Une telle « loi » aurait l’avantage d’être universelle, car fondée en raison, et pourrait être reconnue même par des non croyants. Selon cette approche, ce qui est moral est ce qui est en conformité avec la nature humaine. Malheureusement la nature invoquée ici est un concept flou et il est difficile de dire ce qui fait vraiment partie de la nature humaine. Ainsi selon les vues actuelles, l’homosexualité ne serait pas conforme à la nature humaine, mais jusque vers 1880, l’esclavage a été justifié comme faisant partie de cette même nature humaine. Cette « loi naturelle » est également invoquée pour justifier l’interdiction de la contraception ou de l’ordination des femmes. Le catéchisme de l’Eglise catholique est quant à lui très clair et resté inchangé depuis 1992 : les personnes homosexuelles doivent être « accueillies avec respect, compassion et délicatesse ». En revanche, les actes homosexuels sont considérés comme intrinsèquement désordonnés » et « contraires à la loi naturelle ».
Le pontificat du Pape François marque pourtant un tournant : en 2016, la publication de l’exhortation “Amoris Laetitia” réaffirme que chaque personne, indépendamment de son orientation sexuelle “doit être respectée dans sa dignité et accueillie avec respect, avec le soin d’éviter toute marque de discrimination injuste et particulièrement toute forme d’agression et de violence » (A.L. 250). En 2023, le Dicastère pour la Doctrine de la Foi publie Fiducia Supplicans, qui ouvre la possibilité de bénir les couples homosexuels, sans pour autant changer le texte du catéchisme.
Les Églises orthodoxes
Du côté des Églises orthodoxes, la Bible garde son autorité, mais l’approche historico-critique est considérée avec méfiance. Chez les Orthodoxes, il n’y a pas de Magistère unique, mais une certaine jurisprudence traditionnelle, avec une attitude plus mystique que légaliste. Par ailleurs, les Pères de l’Église gardent un prestige considérable et il est très difficile d’aller contre leurs jugements. Dans les églises orientales (Constantinople, Alexandrie, Moscou), la « Vérité éternelle », immuable, est souvent présentée en opposition à la versatilité des églises catholiques ou protestantes occidentales : c’est un mode de vie qui est entièrement remis en cause, et les Églises orthodoxes sont le plus souvent hostiles aux droits des LGBTQI+, pour défendre la « Sainte Tradition ».
La conscience
Un dernier point, souvent oublié : toutes les règles morales que les Églises chrétiennes édictent ne sont que des guides, des recommandations « objectives ». Dans tous les cas, c’est la conscience individuelle qui juge de ce qui est moral dans la vie de chaque individu. Cette liberté de conscience est un principe présent partout dans le Nouveau Testament et les Églises peuvent difficilement la remettre en cause. Les règles imposées par les Églises peuvent néanmoins créer des complications dans la vie des personnes LGBT, car toutes les Églises exigent d’être en règle avec leurs lois pour pouvoir participer pleinement à la vie de l’Église.
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